THERAPIES NEUROSENSORIELLES
Collectif No Fakemed, 07/2019
La stimulation neurosensorielle prétend stimuler les sens (vue, toucher, odorat, audition, sensorimoteur) pour leur donner leur pleine mesure par l’apport de vibrations.
Cette pratique a notamment été développée par un ORL français, Alfred Tomatis, qui travaillait sur les troubles de l’audition et du langage et a développé sa propre méthode de stimulation neurosensorielle, reposant sur des séances de rééducation auditives à l’aide d’une « oreille électronique ». Il a été radié de l’Ordre des médecins en 1977, avant d’être condamné en 1993 pour exercice illégal de la médecine. D’un point de vue théorique, cette méthode a été très critiquée (1).Une méta-analyse de 1999 note un intérêt de cette technique en montrant des effets positifs sur le développement psychomoteur et cognitif, tout en soulignant les limites de ces résultats. Une méta-analyse (2) plus récente ne montre pas d’efficacité de cette méthode dans le traitement des troubles su spectre de l’autisme (TSA) (3). Elle ne montre pas non plus d’efficacité dans le traitement des troubles de déficit de l’attention et dans l’hyperactivité (4).
L’intégration neurosensorielle est un modèle créé par Anna Jean Ayres, ergothérapeute et psychologue, au cours des années 1970 (5). L’intégration neurosensorielle consiste à travailler sur la perception des sens, sur le traitement de ces informations par le cerveau, puis sur la réaction à l’environnement. L’intégration neurosensorielle vise à traiter les enfants ayant des troubles du traitement des informations sensorielles, essentiellement dans des cas de handicap. Cette technique est abordée en orthophonie, ergothérapie, kinésithérapie. Son efficacité demeure discutée, les résultats étant variables et contradictoires (6). L’intégration sensorielle ne montre pas de preuve de son efficacité dans la prévention de déficiences intellectuelles, de développement ou d’apprentissage chez les patients handicapés (7). Elle a montré une efficacité dans la réalisation des objectifs de fonctionnement et de participation des enfants présentant des TSA(8), mais pas dans l’amélioration de leurs compétences sensorimotrices et langagières, ni dans la réduction des aides sociales nécessaires (9). Dans la prise en charge des troubles du comportement, elle reste proposée, mais sans preuve de son efficacité (10). Il est à noter que les ergothérapeutes cherchent à étudier et évaluer l’efficacité de cette technique (11).
La posturothérapie neurosensorielle est une pratique manuelle prétendant guérir des pathologies par des « neurostimulations manuelles » après avoir, par exemple, « localisé palpatoirement des zones de conflits émotionnels ». (12) La posturothérapie neurosensorielle est indiquée pour la prise en charge des douleurs chroniques, les troubles du sommeil, les troubles obsessionnels compulsifs, le syndrome algodysfonctionnel de l’appareil manducateur, l’anxiété, les migraines, les phobies, etc.
D’un point de vue théorique, cette technique est discutable car s’appuie sur une confusion des termes, un raisonnement imprécis et une technique manuelle (palpation sensorielle) prétendant s’adapter au « seuil de sensibilité des récepteurs sensoriels ou sensitifs pour modifier la boucle dysfonctionnelle ». Nous n’avons trouvé aucune preuve de l’efficacité de la posturothérapie neurosensorielle, ni recherche de preuve d’efficacité, dans aucune pathologie.
Collectif No Fakemed
Références :
1 – Pialoux P. “Sur la demande de prise en charge par la Sécurité sociale de la méthode Tomatis », Bull Acad Natle Med 1993 ; 177 (1) : 43-46.
2 – Gilmor T. “The efficacy of the Tomatis method for children with learning and communication disorders : a meta-analysis”, International Journal of Listening 1999 ; 13 : 12-23.
3 – Sinha Y et coll « Auditory integration training and other sound therapies for autism spectrum disorders (ASD) », Cochrane Database Syst Rev 2011 ; 12 : CD003681.
4 – Baumgaertel A « Alternative and controversial treatments for attention-deficit/hyperactivity disorder », Pediatr Clin North Am 1999 ; 46 (5) : 977-992.
5 – Barbier I. « L’intégration sensorielle : de la théorie à la prise en charge des troubles de l’oralité », Contraste 2014 ; 39 : 143-159.
6 – Rainville S. et Gagnon M.-N. « Expérimentation de l’approche neurosensorielle en ergothérapie au CJM-IU » in « Pratiques innovantes auprès de jeunes en difficulté », Presses de l’Université de Montréal 2010 : 63-82. DOI : 10.4000/books.pum.6470.
7 – Leong HM et coll. « Systematic review of sensory integration therapy for individuals with disabilities : Single case design studies”, Rev Dev Disabil 2015 ; 47 : 334-351.
8 – Case-Smith J et coll. “A systematic review of sensory processing interventions for children with autism spectrum disorders”, Autism 2014 ; 19 (2) : 133-148.
9 – Schaaf RC et coll. « Efficacy of occupational therapy using Ayres sensory integration® : a systematic review”, Am J Occup Ther 2018 ; 72 (1) : 1-10.
10 – Zimmer M et coll. « Sensory integration therapies for children with developmental and behavioral disorders”, Pediatrics 2012 ; 129 (6) : 1186-1189.
11 – May-Benson TA « Interrater reliability and discriminative validity of the structural elements of the Ayres sensory integration fidelity measure”, Am J Occup Ther 2014 ; 68 (5) : 506-513.
12 – Connaissance et Evolution « Formations continues 2017-2018 » : 28 pages.